LE CASERUS TRIO - 2012
8 août 2012
arvis de la Mairie EYMOUTIERS
Jeune ensemble formé par affinité musicale et concordance de vie, le CASERUS TRIO a débarqué en Limousin avec deux voitures rouges chargées jusqu’à la galerie de matériel. A la descente des véhicules, je m’aperçus qu’ils portaient les mêmes chaussures, des mocassins en simili cuir trop neufs, de la même couleur, avec les mêmes lacets blancs. Un signe de reconnaissance ? Étaient-ils sponsorisés ? Cela avait-il quelque chose à voir avec l’éthique du groupe ?
Rapide installation à la maison : qui prend la chambre, qui s’attribue la mezzanine, mais avant tout rassemblement du matériel et des instruments sur l’estrade et surtout hors de tout passage. C’est déjà la fin de l’après-midi quand je les informe que nous sommes invités à dîner chez notre voisine. Grande tablée avec nos amis du « beau lieu », délicieux et convivial repas.
Le lendemain, la moitié du jour se passe à petit déjeuner, l’un part chercher des croissants, l’autre en trouve devant la porte au passage du boulanger itinérant qui klaxonne. Chacun s’émerveille : à peine fait-on deux pas hors de la maison qu’on découvre le paysage sauvage et verdoyant qu’offre notre hameau de Beaulieu. Passage de chevaux, découverte de la fontaine, visite régulière des chiens qui tiennent le village, apparition ça et là de quelques voisins, disparition momentanée de celui ou celle qui va faire sa toilette, va-et-vient incessant et sympathique du à l’enthousiasme de se trouver ensemble et pour eux d’être « en tournée ». Puis installation sur l’estrade de la formation complète pour une répétition avant le concert du soir.
Les voisins dirent quelques jours plus tard avoir entendu une belle voix et que ça venait de chez nous, qu’ils avaient bien reconnu une vraie voix et non une voix enregistrée, que c’était sûrement la jeune fille brune qui était dans le village mercredi, celle arrivée en voitures rouges avec trois garçons... Cela ne vous a pas trop dérangés ? Quand la musique est bonne, répondirent-ils, cela ne nous dérange jamais, et puis il faut bien vivre, non mais ! Il va être six heures, je les préviens qu’Axel et moi partons devant en scooter et qu’on se rejoint au pied de la Collégiale, dans la ruelle en contre-bas, devant le Potron-Minet, qu’on va installer les chaises, les panneaux et placer les barrières pour le public.
Tout est lisse et se déroule comme prévu. Pol, le barman et cuisinier, est fin prêt, c’est-à-dire à la bourre, mais il aime travailler comme ça, ça le boOste ! Le matériel de signalisation a été aligné contre le mur comme convenu, reste à installer tout ça dans les normes et les règles de l’art, on agit comme on croit bon. De toute façon un employé municipal passera bientôt ajuster nos improvisations. C’est alors que les véhicules rouges des musiciens s’engagent dans le sens interdit, bloquant plus ou moins la rue. Portes ouvertes, ils découvrent le site avec admiration, en testent la résonance en déchargeant instruments, câbles, pupitres et autres. Tout se fait naturellement et dans la bonne humeur.
Le concert est prévu à 19h30 et je suis étonné de voir plusieurs groupes de personnes dès 19h. Heureusement tout est prêt : ma petite table, où trônent la caisse et le tampon de 7AC qui sert à marquer les billets d’entrée, est installée, les plaquettes du festival sont en éventail, bien en vue, les bougies sur les tables, les chaises autour des tables, les tables en regard de la scène... Jusqu’à 20h le public ne cessera pas d’arriver, par deux, par trois jusqu’à ce qu’il n’y ait plus aucune place assise. Les retardataires resteront debout. Le bar s’est rempli : la musique peut commencer. Thomas et ses deux complices entament quelques sets avant qu’apparaisse « en vedette américaine » l’attendue Emma. Pour les avoir écoutés lors d’un anniversaire à Paris en juin dernier, je prévoyais l’impact émotionnel que produirait la voix d’Emma sur un public de connaisseurs, car ils étaient venus nombreux ceux qui aiment vraiment le jazz ! L’effet fut quasi immédiat, plus un corps ne bougeait face à cette voix limpide et sans effets. Pas de vibrato excessif. D’ailleurs, pas de vibrato du tout. Les mots sortaient comme pensés et chantés pour la première fois. On pouvait comprendre pourquoi telle ou telle chanson avait été composée. Emma représentait alors toutes les femmes qui ont inspiré ces mélodies et son innocence attirait encore toutes les inspirations. Dès la première chanson elle reçut un tollé d’applaudissements.
Installé à ma petite table, je ne reçus pas moins de dix personnes venues tour à tour me demander qui était cette jeune chanteuse et qui étaient ces trois musiciens pleins de talent. Un ami américain me demanda même de retarder la deuxième partie afin qu’il puisse retourner chez lui dire à sa femme de venir écouter ça. Je le prévins qu’il n’y avait aucun entr’acte. Il dévala la rue de la Collégiale, passa le pont de chemin de fer, grimpa jusqu’à son domicile et revint dix minutes plus tard accompagné de sa femme qui tendait déjà l’oreille en montant la rue quatre à quatre. Les amis jazzy tendaient l’oreille et leur verdict ne se fit pas attendre : quelle voix ! Quels musiciens ! Emma, à la demande du public, a repris trois chansons.
C’était le premier concert sous contrat du CASERUS TRIO ! Tout le monde a souhaité que ce soit le début d’une longue carrière pour ces sympathiques et talentueux musiciens. Quelques uns leur dirent cependant qu’ils ne seraient pas toujours reçus comme ça ! Pol avait dressé une grande table dans le bar et préparé un dîner copieux et délicieux. Merci au Potron-Minet
Le lendemain, après le déjeuner, les deux voitures rouges reprirent leur chemin. Bordeaux semblait être leur prochaine destination estivale...